Vous serez tellement terrorisés

Avant d’entamer une marche dans la jungle, un guide donne ses consignes à ses compagnons de marche du jour :

« Cette jungle est un endroit sauvage. Il est peu probable que nous rencontrions des situations dangereuses, mais cela reste possible. Il existe trois animaux dangereux pour nous : le rhinocéros, l’éléphant et le tigre.

Si nous rencontrons un rhinocéros, et qu’il commence à charger, il faudra courir à la recherche d’un arbre dans lequel vous pourrez grimper rapidement. Une fois que vous serez à 2 mètres de haut, vous serez à l’abri.

Si nous rencontrons un éléphant, grimper à un arbre ne sert à rien. Il vous atteindrait facilement en hauteur, ou abattrait l’arbre. Vous devez rejoindre la rivière. L’éléphant est obligé d’être très prudent lorsqu’il descend un talus, si lentement que cela vous laissera le temps de vous échapper. D’ici que vous trouviez la rivière, courrez en zigzag : l’éléphant est rapide, mais il a du mal à changer de direction pendant sa course.

Si nous rencontrons un tigre, il n’y a rien à faire. Le tigre court plus vite que vous, et saute plus haut que vous. S’il veut vous manger, il y parviendra. Mais la bonne nouvelle, c’est que vous ne faites pas partie de son festin habituel. Par défaut, il n’a pas spécialement envie de vous dévorer. Donc l’attitude à avoir consiste à ne pas se comporter comme du gibier : ne vous mettez pas à quatre pattes, et ne partez pas en courant. »

Sentant que cela fait beaucoup d’informations à enregistrer d’un coup, il les répète une seconde fois. Puis il ajoute :

« Rassurez-vous. Si nous rencontrons l’une de ces trois situations, vous serez tellement terrorisés qu’il est peu probable que vous pensiez à ces conseils. Je vous redirai quoi faire, le moment venu. Et comme vous l’aurez déjà entendu avant, vous pourrez réagir sans perdre une seconde. »

[...]

A travers cette anecdote, on devine que ce guide a compris comment la mémoire fonctionne, et comment il peut l’utiliser à son avantage.

D’abord, il permet à ses auditeurs de bien enregistrer l’information qu’ils doivent retenir. Il donne peu de conseils, avec des mots simples, et capte l’attention en ne cherchant pas à diminuer le danger. Puis, il répète ses consignes une deuxième fois, pour renforcer le souvenir.

Ensuite, il comprend que ce n’est pas parce que les gens n’accèdent pas spontanément à ce souvenir dans un moment de stress que ce souvenir n’a pas été stocké. Il prévoit à l’avance de compenser ce problème en aidant ces gens à accéder à ce souvenir.

Enfin, il connait la puissance d’un souvenir dans la vitesse de compréhension d’une situation, et parie dessus pour s’assurer que ses clients seront plus réactifs s’ils n’ont pas à réfléchir au moment d’agir.


D'autres articles sur la communication, la concentration, la mémoire